mardi 15 décembre 2009

Antichavisme : généralités populistes

Les anti-chavistes sont ignorants. Pas imbéciles ni stupides, ignorants.
Ignorants de la politique de leur pays, des dynamiques collectives, ignorant de leur conditionnement social, confondant révolutionnaire et chaviste, socialisme et communisme, droits de l'homme et propriété privée
ignorance qui les pousse a accepter comme possible une autre réalité.
A tel point qu'en 2002 alors que le coup d'Etat de ceux là même suivait son cours, plusieurs millions de personnes défilait dans le centre de Caracas en soutien à Chavez. Mais ils ne "savaient pas".

Les anti chavistes sont méprisant pour Chavez qu'ils haïssent jusqu'au plus haut point, mais aussi pour ceux "d'en bas" ce "Peuple" dont on ne sait qui il est, tantôt stupide, dogmatisé, ou manipulé,
tantôt violent, voleurs, paresseux, sales. Et puis dépensier, qui leur volent leur électricité, leur eau, alors que, eux, subissent les coupures d'eau, les apagones (coupures d'électricité).
Avec des discours flânant parfois avec le classique "ils sont trop mal éduqués pour voter".
Classe laborieuse, classe dangereuse disait-on il y a déjà un siècle.


Et à l'inverse ils ont aussi un complexe de supériorité qui leur fait croire que eux, la classe moyenne, sur-visible à la télévision, représentent la majorité voire la totalité de la population : "Chavez doit être le président de tous les Vénézueliens" disent-ils. Ils sont dans les faits entre 25 et 35% à être anti chaviste, taux évoluant assez peu au fil des élections.Ce n'est pas pour rien que Chavez a gagné TOUS les scrutins sauf un (en 2007) depuis le début du processus.

Ils sont anti chaviste comme nous avons chez nous les anti sarkozystes. (soit ceux qui ne militant pas pour un changement de société bien entendu). Sans projets, sans débouché politique, avec des divisions internes pour le leadership, ne portant rien sinon du vent, aucun idéal, dans la contestation systématique, chaque mouvement de Chavez étant perçu comme une attaque contre eux, ils s'opposent à tout, y compris à des mesures pouvant aller dans leur intérêt personnel. Et pour cela ils peuvent, comme en 2002, utiliser la violence.


Le plus surprenant, c'est qu'ils doivent tout ou presque au processus.
Ceux-là même vont acheter leur nourriture moins chère au Mercal, tout en expliquant qu'il n'y a rien à manger à cause des rationnements. Ils se font soigner à Barrio Adentro tout en expliquant que les cubains font du mauvais travail. les mêmes bénéficient des programmes d'aide aux personnes âgées, aux handicapés, aux femmes enceintes, et crachent sur l'assistanat.


Cette classe moyenne anti chaviste a tout simplement peur.
Peur de l'autre, du pauvre, peur de la dictature, peur de son voisin,



Car il ne faut pas se faire d'illusion. Si l'on enlève les crédits et les quelques avantages en nature de leur travail intellectuel, plus favorisé que le travail manuel, ils sont comme les autres.


Bassement marxiste comme idée, mais la question de la classe moyenne a depuis longtemps été un outil pour diviser la classe des exploités. Avec succès.


Comment leur en vouloir de défendre leurs "minimes privilèges", de haïr le pauvre et d'envier le riche ?
Et la crise actuelle leur en a fait brutalement prendre conscience. 40 ans de néo libéralisme, et bien plus d'éducation à l'individualisme, l'égoïsme laissent des traces. Ils ont voté pour les partis qui ont exécuté la répression pendant 40 ans allant jusqu'à faire entrer les chars et l'armée dans l'université. Et ce sont leurs enfants dans cette même université (l'UCV) qui manifestent aujourd'hui contre les lois de démocratisation de l'enseignement.

Un chiffre ? Taux de pauvreté : 1996, 80% de la population. 2006, 30%. Chiffres ? de l'ONU bien sûr.

Cette classe moyenne n'était que peau de chagrin avant le chavisme.


Ou alors tellement réduite que ridicule. Elle s'est considérablement développée grâce à lui et ses politiques de redistribution (et mourra avec lui)
Et c'est peut être ça qui les rends si haineux, si anti chavistes. C'est qu'ils ont une dette envers Chavez. Il les a enrichis au début en commençant à redistribuer à les richesses. eux qui n'était pas tous forcément aussi fortunés qu'ils le sont aujourd'hui. Ce n'est pas qu'ils se sont enrichis sur la révolution (ça c'est la bourgeoisie bolivarienne ou boliburgesia), c'est plutôt qu'en diminuant les inégalités ils se sont retrouvés de fait avantagés. Et aujourd'hui, Chavez continue de redistribuer plus largement à ceux qui n'ont toujours rien et ce sont ceux-là même qui se retrouve "victimes des politiques redistributives". Ils font une fixation sur Chavez, car il représente tout ce qu'ils haissent : l'autre, l'étranger, le métis, le pauvre, le populaire.
Tout ce qui sort de leur idéal : occidental, blanc, riche, autoentrepreneur, libéral.
Ils dénoncent le castro-communisme rampant, le culte du chef qui est extrêmement fort chez eux, en permanence focalisé sur Chavez, qu'ils haïssent autant qu'il leur est indispensable pour se sentir exister.
Ils se disent en dictature, disent qu'ils n'ont pas possibilité de s'exprimer, et le disent sur tous les médias d'opposition, télé radio, journaux, à l'étranger, même sur les murs ou dans la rue.


Les voila donc les anti chavistes. Demain ils manifesteront pour la liberté d'expression. Après demain ils se plaindront de leur pouvoir d'achat qui diminue, le surlendemain, ils s'insurgeront contre la violence qui augmente. Puis ils manifesteront contre la nouvelle loi de la Police Bolivarienne, nouvel instrument de la dictature chaviste.OU contre la fermeture (non renouvèlement de concession hertzienne) d'une chaine d'opposition (disponible sur le câble) et pour les droits de l'homme.
Et c'est comme ça depuis 10 ans m'affirme-t-on ici. Ils sont tellement dans leur monde parallèle qu'il est très difficile pour les déçus du chavisme de se rallier à eux. Ils ne montent pas en puissance.
C'est la critique des problèmes dans la révolution qui prend (un peu) d'ampleur.


Mais ce qui sauvera le processus pendant encore un bout de temps, c'est qu'ils sont tellement pétris de haine, d'individualisme, tellement irrationnels, qu'ils ne peuvent pas s'organiser collectivement pour défendre leur vision politique commune. Et quand ils le font, corruption et lutte de pouvoir reprennent le dessus très rapidement. Le seul moyen pour eux de détruire le processus est la violence. Ils le savent et ont échoué en 2002, où ils auraient pu renverser la dictature.
Mais voila, si pour eux rien n'a changé, les pauvres, les miséreux, les exclus, ont retrouvés leur dignité.
Et ça ils l'avaient oublié en 2002, et ils l'oublient toujours. Et c'est ce qui sauvera ce processus.
car les pauvres eux, s'organisent, s'éduquent, critiquent et s'auto-critiquent, manifestent, et avancent, lentement (trop?), mais surement.


PS : je sais que ceci était un panorama totalement à charge, né de ma défiance contre les propres membres de ma classe sociale, dans une tentative de rejet systématique pour expier en vain mon habitus petit bourgeois. Merci de me le rappeler.

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