vendredi 20 novembre 2009

Les aventuriers du trotskysme perdu

Je ne suis pas trotskyste, je n'ai pas lu Léon Trotsky..
Il n'empêche que je commence à connaître un tout petit la question pour avoir d'une part des très bon camarades trotskystes, d'autre part pour avoir approché ce milieu au moment de la naissance du NPA. Enfin pour les avoirs rencontrés sur le terrain militant, dans les mouvements sociaux en France ainsi qu'ici au Venezuela

Bundesarchiv Bild 183-R15068, Leo Dawidowitsch Trotzki.jpgPour l'histoire, le trotskisme est née de son théoricien, Lev Davidovitch Bronstein dit Léon Trotsky, fervent disciple de Vladimir Illitch Oulianov dit Lénine. Trotsky participa déjà aux premières tentatives avortées de changement de société en 1905 par exemple. Il a participé activement à la Révolution Russe de 1917. Trotsky a joué un rôle plutôt fondamental puisque quelques mois après l'éclatement de la révolution, dans la situation de guerre civile + guerre des puissances étrangères, c'est Léon qui fondera l'Armée Rouge et qui, pour vaincre les puissances hostiles tsaristes ou occidentales, écrasera les révoltes anarchistes de la Makhnovchina ainsi que les marins insurgés du Kronstadt, accusée d'être contre-révolutionnaires, origine d'une haine partagée entre trotskystes et libertaires qui dure encore.

Le même a également mis en place un plan de militarisation du travail au début des années 20 et est devenu l'un des principaux dirigeants de l'URSS des années 20. Lénine lui-même voyait en lui son successeur bien que sa rigueur le faisait rechigner.
Sauf que comme vous le savez, c'est une brute géorgienne qui se fera appeler Staline qui prendra le pouvoir à la mort de Lénine et qui éliminera physiquement ses premiers opposants très rapidement, et fera naitre la fameuse expression hitléro-trotskyste, encore utilisée par certains « politologues » de droite réactionnaire.
Trotsky sera assigné a résidence puis expulsé définitivement d'URSS. Alors que les services secrets de l'URSS, NKVD puis KGB assassinent systématiquement les trotskystes exilés dans le monde entier, et les purges et procès de Moscou éliminent tous ceux qui restaient en URSS, Trotsky se réfugiera au Mexique où il sera assassiné quelques années plus tard, en 1940 d'un fameux coup de piolet de la main d'un certain Ramón Mercader, agent de Staline.

Fichier:Logo of the Fourth International.svg
Voilà pour la page historique. Sauf qu'avec la mort de Trotsky, le courant n'est pas mort pour autant. Il a perduré au sein de l'association de la IVe Internationale Communiste que Trotsky avait fondé avant de mourir, qui existe encore aujourd'hui et dont sont membres de nombreuses organisations politiques dans le monde entier, dont en France, qui dispose d'une des sections les plus importantes : la Ligue Communiste Révolutionnaire (qui existe toujours justement pour appartenir à la IVe Internationale..).

A quoi reconnait-on un trotskyste ?

Ni à ses cheveux, ni à ses habits, mais à ses principes d'action et son discours.

Le trotskyste est adepte d'une stratégie appelée l'entrisme. Il s'agit dans le principe d'effectuer une entrée groupées de militants trotskystes dans des organisations de travailleurs réformistes mais plus larges, pour, de l'intérieur, renverser la ligne majoritaire « molle » vers une ligne plus révolutionnaire.
Il y a des désaccords entre les trotskystes eux -mêmes sur l'étendue où cet entrisme doit aller. Même si tous les trotskystes aujourd'hui sont d'accord pour dire que Lionel Jospin ou Henri Weber (du PS) ne sont plus trotskystes depuis longtemps.

Voici une blague : «A deux trotskystes, ça fait une tendance, à trois ça fait une scission ». En France existent aujourd'hui comme organisations trotskystes la LCR, Lutte Ouvrière, le Parti Ouvrier Indépendant + de nombreuses tendances minoritaires au PCF au PS, ainsi que les groupuscules CRI, GSI, AJR ... et bien d'autres. Bref vous aurez compris que l'unité n'est pas une qualité fondamentale du mouvement.
Il y a également débat de fond depuis cinquante ans pour savoir si l'on écrit trotskisme ou trotskisme. La encore je remets la question dans les mains des experts sur la question.

Autre dimension fondamentale, l'internationalisme. Outre le pouvoir, le désaccord idéologique fondamental entre Trotsky et Staline portait sur la question de savoir si le communisme doit-être mondial ou s'il doit se concentrer dans un seul pays. On sait qui a choisi quoi avec les « succès » que cela a eu.
Je précise bien sûr que les trotskystes comme moi-même considérons EVIDEMMENT que le stalinisme étaient un totalitarisme abominable. Qu'on ne me reproche pas après de faire l'apologie de criminels. En revanche, les trotskystes s'ils rejettent le stalinisme restent ferme soutien de ce qui s'est passé avant, sous Lénine et restent fidèles aux idées marxiste-léninistes. Oui c'est obscur pour moi aussi.

Dernière chose, le trotskyste dispose d'une culture politique,d 'une connaissance de l'histoire des mouvements ouvriers et révolutionnaires assez hallucinante ce qui fait que sur le terrain d'un débat, il aura toujours raison.

Voilà donc une description au piolet (ahah) mais ce sont les fondamentaux théoriques. Je laisse les experts venir en débattre, et donc susciter une nouvelle tendance. Non je plaisante

Dans la pratique et pour des militants de gauche / extrême gauche, le trotskysme pose un double paradoxe :
  • il faut environ 3 ou 4 militants « normaux » pour égaler en qualité et en quantité le travail de terrain abattu par un trotskyste. Je sais pas d'où ça vient, mais leur discipline, leur manière de s'organiser font qu'ils sont extrêmement efficace et donc quasi indispensables.

  • Ils ont la fâcheuse tendance à vouloir récupérer à leur compte tout succès de mouvement social et dénigrer systématiquement tout échec de ce même mouvement, parfois en « aidant involontairement » à faire échouer si la manière de faire ne leur va pas.
Il se trouve qu'il y a aussi des trotskystes au Venezuela,
j'en ai rencontré un plutôt gratiné il y a peu.

On commence à discuter du processus. Et d'emblée, sans savoir quelle était l'orientation politique du type qui me parlait, ça m'a frappé immédiatement, dans la teneur du discours qu'il utilisait, les mêmes tournures de phrases, les mêmes expressions que j'avais pu en entendre en France. J'ai sans le vouloir tout de suite compris qu'il était trotskyste. Évidemment, j'ai écouté ce qu'il me disait. Le problème c'est que tout ce qu'il me racontait ne sonnait pas comme sortant de sa bouche et de son cerveau mais de celui de son organisation. Abandonnant la rationalité où j'aurais de toute façon pas pu lutter, j'ai donc essayé de le prendre par les sentiments, proprement inutile, soit de le faire rire de son discours. Et c'est aussi une autre faculté du trotskyste d'avoir extrêmement de mal à rire de lui-même avec d'autres militants.
Je n'ai donc même pas essayé de lui chanter « la Ligue à Léon »

Et qu'est-ce qu'il me disait cet ami trotskyste ? Je retranscris avec une certaine mauvaise foi.
« Tu comprends, le processus bolivarien au final ça se résume à un capitalisme d'État, il n'y a pas de révolution sinon un réformisme mené par une nouvelle petite bourgeoisie bureaucratique réactionnaire. »

Je lui parle de conseils communaux que j'ai visité . « non mais c'est bien mais c'est pas fondamental, c'est une minuscule minorité ». Je le provoque alors en lui parlant d'avant garde éclairée « non, mais oui, mais ce sont pas eux qui vont impulser le processus, c'est l'exception, enfin tu comprends ce que je veux dire ». Et puis bon là j'ai senti qu'il commençait à se contredire assez violemment.
Bref avant garde ok mais ça doit être nous sinon ça marche pas.Le constat n'a pas fondamentalement faux, mais il y a l'art et la manière de le dire. Et là ça coince.

Le trotskyste est quelqu'un critique, éminemment critique, d'une critique rare. Mais il agit généralement peu quand il critique beaucoup quelque chose. Ou alors, il défend corps et âme cette chose (qui peut être la même qu'il a critiqué auparavant avec quelqu'un d'autre), et dans ce cas là il est tellement impliqué qu'il se retrouve à avoir un intérêt personnel en jeu dans son discours. Et ni de ces comportements, ni l'un ni l'autre, il ne les reconnaîtra.

Que je rassure mes camarades militants trotskystes qui me lisent peut être, tous ne sont pas comme ça bien heureusement, je pense que ce n'est qu'une minorité, comme partout. La grande majorité doivent être des militants conscients de tout cela mais doivent avoir d'ailleurs bien du mal à se faire entendre dans leurs organisations où la question de fonctionnement démocratique prête quelque peu à débat.
J'ai également rencontré deux jours plus tard d'autres trotskystes au discours plus souples, moins péremptoire et plus cohérent, et je suis actuellement en train de lire un bouquin d'une figure du trotskisme international, Tariq Ali, bref je n'ai aucune répugnance de principe comme peuvent en avoir certains anti-trotskistes.

Quand à la trahison de ses idées comme Jospin, les maoïstes et pro-chinois des années 70 s'en sont faits une spécialité et sont allés bien plus loin qu'une simple participation à des exécutif pour devenir des pontes néolibérales. Je renvoie à la lecture du livre « lettre ouverte à ceux qui sont passés du Col Mao au Rotary, de Guy Hocquenghem »

http://www.relay.com/Covers/Bigs/12713.jpgEt surtout contrairement à l'idée que s'en fait la droite réactionnaire.

le trotskyste n'est pas un agent secret infiltré, il n'avance jamais masqué, au contraire, ils se montre souvent, parfois trop, surtout quand il y a des caméras. Mais je suis mauvaise langue.

Au delà de toutes les caricatures qu'on peut faire (l'exemple que j'ai eu était assez violent j'en conviens)
il y a quand même une constante plus générale qui pose un problème assez conséquent pour tout militant..

C'est peut être une illusion mais les quelques personnes dans la même situation que la mienne que j'ai croisées qui sont revenus de la Bolivie, m'ont dit d'entrée de jeu ceci :
"le principal danger pour la révolution bolivienne aujourd'hui, ce sont les trotskystes qui noyautent toutes les sphères de pouvoir".

Et le pire, c'est que si l'on s'avise de discuter sérieusement de ces problèmes avec un militant trotskyste, il est quasi certain que celui-ci ou celle-ci va nous traiter de stalinien, soit l'équivalent de traiter quelqu'un de nazi ou d'antisémite dans un discours plus commun, ce qui est la meilleure manière de clore la discussion.

Les trotskystes entendent mais n'écoutent fondamentalement pas
, y compris les gens qui ont des sympathies avec eux. Les trotskystes sont tellement révolutionnaires, ils veulent tellement bien faire que pour arriver à enfin faire cette révolution communiste, ils sont prêts à écraser toute contestation sur la manière de faire celle-ci, parfois à raison, souvent à tort, et à vouloir tellement bien faire, ils finissent par mal faire, même parfois par empêcher ce qu'il promeut. Je voudrais simplement leur dire que de temps en temps, il faudrait qu'ils écoutent la voix du peuple dont ils pensent à être le porte-voix.

1 commentaire:

TON TON TOSH a dit…

les poétes ne sont-ils pas les révolutionnaires les plus efficaces ?.........
leur boulot n'est pas de changer le monde mais d'innoculer en chacun de nous le réve , la liberté combattre les préjugés ............
à consommer sans modération

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